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Modifications apportées pour renforcer le système canadien de financement hypothécaire

  • Jason Ellis, Directeur général, Marchés financiers

Bon matin!

Bon, bien, allons droit au but. Le gars de la trésorerie n’a aucune envie de perdre son temps sur des choses frivoles aujourd’hui. Si vous êtes un prêteur ou un emprunteur dans le marché hypothécaire, à moins d’avoir passé la semaine sur Mars, vous savez que le ministre des Finances a annoncé lundi – le jour du Nouvel an juif! – un certain nombre de changements visant à « renforcer le système canadien de financement du logement ».

Dans le cas où vous n’avez pas encore pris connaissance des détails, voici les principaux changements :

Simulation de crise des taux d’intérêt hypothécaires

Pour se qualifier pour l’assurance hypothécaire, le ratio d’amortissement brut de la dette (« ABD ») ne peut dépasser 39 %. L’ABD représente le pourcentage de votre revenu familial mensuel que vous affectez à vos coûts de logement, dont les paiements hypothécaires, les impôts fonciers, les coûts de chauffage et la moitié des frais de condo (s’il y a lieu). À compter du 17 octobre, tous les propriétaires assurés doivent satisfaire aux ratios de service de la dette calculés selon le taux sur cinq ans affiché par la Banque du Canada (le « taux de référence »), lequel s’établit actuellement à 4,64 % (comparativement à l’actuel taux contractuel sur cinq ans d’environ 2,44 %). Pour mettre ce changement en contexte, un emprunteur qui s’était qualifié pour une hypothèque assurée sur cinq ans de 300 000 $ moyennant un ABD de 39 % la semaine dernière ne se qualifierait plus que pour une hypothèque d’environ 240 000 $ cette semaine. Il s’agit d’une baisse de 20 %.

Selon Genworth, jusqu’à un tiers des hypothèques assurées à ratio élevé, contractées principalement par de premiers acheteurs, respecteraient difficilement les nouveaux ratios de service de la dette. Certains acheteurs devront donc envisager l’achat d’une propriété moins coûteuse ou risquent d’être carrément exclus du marché.

Modifications aux critères d’admissibilité aux prêts assurés à ratio prêt-valeur faible

À compter du 30 novembre, les prêts hypothécaires assurés par des prêteurs au moyen d’une assurance de portefeuille doivent satisfaire aux critères d’admissibilité qui s’appliquaient jadis aux prêts à ratio élevé. Voici les nouveaux critères qui s’appliquent aux prêts assurés à ratio prêt-valeur faible :

  • Un prêt contracté notamment pour l’achat d’une propriété ou le renouvellement subséquent d’un tel prêt;
  • La période d’amortissement ne peut dépasser 25 ans;
  • Le prix d’achat de la propriété doit être inférieur à 1 000 000 $;
  • Un pointage de crédit minimal de 600 est exigé;
  • Le ratio ABD maximal est fixé à 39 % et le ratio ATD maximal est fixé à 44 %. Le ratio est calculé en appliquant le plus élevé des taux suivants : le taux du contrat hypothécaire ou le taux affiché par la Banque du Canada (le « taux de référence »);
  • Le logement assuré doit être occupé par le propriétaire.

Le changement possiblement le plus lourd de conséquences est que le refinancement hypothécaire ne sera plus une activité assurable. Il en résulte que les programmes de titrisation de la SCHL – dont les programmes de TH LNH et d’obligations hypothécaires du Canada – ne seront plus admissibles. Ces modifications risquent d’affecter la titrisation de jusqu’à la moitié des hypothèques traditionnelles.

Puisque nous parlons d’assurance de portefeuille, il vaut peut-être la peine de mentionner le nouveau cadre du capital des sociétés d’assurance hypothécaire élaboré par le Bureau du surintendant des institutions financières (« BSIF »). En bref, les assureurs hypothécaires devront détenir beaucoup plus de capitaux. BEAUCOUP PLUS. La période d’observations sur le projet de préavis prend fin le 21 octobre et les changements définitifs prendront effet le 1er janvier 2017. Si vous cherchez quelque chose à faire ce week-end, prenez le temps de ventiler votre colère au BSIF. Peu importe la forme définitive que prendra le préavis, une chose est certaine. Les primes d’assurance-prêt hypothécaire vont augmenter. BEAUCOUP AUGMENTER. Dans le cas d’une assurance de portefeuille à ratio prêt-valeur faible (du moins pour les hypothèques qui y sont encore admissibles), la prime risque d’être multipliée par deux ou trois. Il est presque certain que les taux hypothécaires augmenteront également.

L’impact sur le marché des prêts assurés par la SCHL pour l’habitation multifamiliale n’est pas clair. Si les modifications aux critères d’admissibilité à l’assurance hypothécaire sont mises en œuvre par le biais de changements au Règlement sur les prêts hypothécaires admissibles et au Règlement sur les prêts à l’habitation assurables, qui s’appliquent aux « prêts hypothécaires sur les résidences unifamiliales », il est alors possible que les emprunteurs du marché de l’habitation multifamiliale ne soient pas affectés et que l’assurance du refinancement demeure possible et que les programmes de titrisation de la SCHL soient maintenus. Il est trop tôt pour se prononcer avec certitude, alors nous vous tiendrons informés de l’évolution de la situation. Malheureusement, il est peu probable que les primes d’assurance exigées dans le marché de l’habitation multifamiliale n’échappent au nouveau cadre du capital. Une chose est sûre : les coûts vont augmenter.

Consultation à venir sur le partage des risques avec les prêteurs

Et ce n’est pas fini… Le gouvernement a aussi annoncé qu’il compte se pencher sur la possibilité d’une certaine forme de partage des risques pour que les prêteurs assument une part des risques liés aux prêts hypothécaires assurés. Un exemple serait l’imposition d’une franchise sur les produits d’assurance. La consultation publique sur ce changement proposé prendra un certain temps. L’impact potentiel n’est pas clair à ce stade-ci, mais le thème d’un resserrement des exigences en matière de capital demeurera d’actualité. Et les coûts d’emprunt augmenteront.

Une issue intéressante des annonces faites lundi a été une contraction sévère des écarts des TH LNH. Certains acteurs du marché soutiennent que le resserrement des règles de prêt et le renforcement des exigences en matière d’assurance hypothécaire pourraient nuire à l’émission de nouvelles hypothèques et aux ventes de créances hypothécaires. Je vais prendre un certain réconfort dans le fait que les écarts se sont resserrés.

Dans les marchés boursiers, le cours de l’action de First National a reculé après que les marchés ont appuyé sur le bouton d’alarme et ont vendu à l’aveugle des titres de prêteurs non bancaires et ceux d’autres prêteurs comme Home Bank et Banque Équitable. Le titre de FN a clôturé la journée d’hier à 25,60 $, en baisse de 6,37 $ ou de près de 20 % par rapport au début de la semaine. Je n’ai pas grand-chose à dire à cet égard… Je ne suis pas trop sûr jusqu’où je peux aller, et le gars de la trésorerie ne cadrerait pas bien en prison. Cependant, si vous lisez des documents comme notre déclaration annuelle, vous apprendrez que la moitié de nos émissions est financée par des ventes d’hypothèques à de grands investisseurs qui n’assurent ou ne titrisent pas les hypothèques conventionnelles qu’ils achètent de FN. Je ne m’avancerai pas plus loin à cet égard. Sur une note positive, notre rendement boursier s’établit maintenant à 6,67 %. Ça, c’est bon pour nous.

Quant à la politique monétaire, l’application du nouveau taux de référence est l’équivalent d’une hausse de taux ciblée de 2,20 %, applicable seulement au marché hypothécaire, puisque nombre d’emprunteurs devront désormais se qualifier selon un taux de 4,64 % plutôt que le taux de 2,44 % qui prévaut dans le marché. L’élimination des périodes d’amortissement de plus de 25 ans pour les prêts assurés à ratio faible forcera aussi les mensualités à la hausse. La conclusion est que le logement devient moins abordable et que la Banque du Canada risque d’avoir un peu plus de marge de manœuvre pour baisser ses taux sans craindre d’enflammer le marché de l’habitation.

À la lumière des événements de cette semaine, je vais néanmoins essayer de passer un week-end zen.

On n’avance pas en reculant.

RESTONS CALMES ET NE BAISSONS PAS LES BRAS. (Et victoire aux Jays!)

Le gars de la trésorerie

Jason Ellis, directeur général, marchés financiers