Y aurait-il quelque chose de malsain qui se trame dans le marché de plus en plus effervescent des immeubles en copropriété au Canada? Dans un contexte où le prix des maisons individuelles devient de plus en plus inaccessible pour la moyenne des acheteurs, les copropriétés gagnent en popularité, car elles sont plus abordables.
Malheureusement, certains acheteurs se retrouvent laissés à eux-mêmes. Ils tentent de tirer parti des prix alléchants offerts lors de la prévente des unités. Ce qu’ils se font vendre, en fait, c’est essentiellement la photo d’un immeuble en copropriété et la promesse d’une construction à venir et d’un déménagement futur. Parfois, cela ne se concrétise pas. Le promoteur annule l’entente et rembourse le dépôt. (Dans certains cas, le projet réapparaît sur le marché peu de temps après, à des prix beaucoup plus élevés.)
Cela se produit rarement. À Toronto, dans un marché en pleine flambée, plus de 600 projets sont à l’étape de la prévente ou de la planification. Au cours de la dernière année, à peine huit de ces projets ont été annulés. Même si la situation reste hors du commun, certaines voix demandent un resserrement de la réglementation pour qu’il soit plus difficile pour les promoteurs de se retirer.
L’annulation des projets est rarement illégale. Le contrat entre le constructeur et l’acheteur est presque toujours valide, quoique largement à l’avantage du constructeur. Lorsque des promoteurs annulent des projets, ils le justifient généralement par la faiblesse des préventes, des difficultés financières ou des retards dans l’obtention des permis et des approbations. Étonnamment, cela peut même comprendre des éléments aussi fondamentaux que le changement de zonage.
Mais outre les considérations légales, les annulations peuvent être lourdes de conséquences pour les acheteurs. Ils ont souvent pris des décisions familiales et financières importantes en fonction de la date prévue de leur déménagement. Lorsque l’entente est résiliée du jour au lendemain, ils doivent rapidement se réorganiser. Vu la croissance effrénée des prix dans le marché, ils se retrouvent parfois dans l’impossibilité de trouver autre chose.
L’intérêt des préventes, c’est évidemment le prix. Les unités offertes en prévente auront inévitablement une valeur beaucoup plus élevée à la date de l’emménagement qu’à la signature du contrat. Une partie de cette appréciation vient de la gestion du risque – l’achat d’un bien immobilier qui existe concrètement est beaucoup moins risqué que l’achat d’une photo et d’une promesse.
Tout acheteur qui s’intéresse aux préventes doit se renseigner sur le marché et le promoteur, en examinant bien les antécédents de ce dernier. Les préventes sont offertes sciemment pour créer de la fébrilité et un sentiment d’urgence auprès des acheteurs. Une bonne connaissance des conditions réelles du marché et de la véritable nature du constructeur peut grandement atténuer cette frénésie chez l’acheteur.
Il est aussi possible de se tourner vers le marché des unités un peu plus vieilles et déjà construites. Elles sont plus difficiles à trouver, mais elles offrent parfois une valeur plus intéressante et peuvent être une meilleure façon de générer de la valeur nette. Par exemple, de grandes unités des banlieues de Toronto se vendaient 590 $ le pied carré en 2017. Au centre-ville, les nouvelles unités en copropriété déjà bâties, mais plus petites, se vendent 1 000 $ le pied carré.